
Résumé :
Ce qui est arrivé à Betty est le rêve de toutes les femmes. Et pourtant.*
Mon avis :
C’est un roman qui sonne comme une fable.
Les premières années qui passent comme dans un étourdissement : l’enfance, un père en colère qui a perdu une jambe en Algérie, une mère qui disparaît trop tôt, l’adolescence, les études, la rencontre d’André, qui donne vie au bois. Les années passent, avec un corps qui se forme, un visage qui se dessine, un coeur qui grandit.
« Le bonheur, tout le monde le sait, est un invité fantasque. Il quitte parfois la table sans prévenir, sans raison. »
Mais voilà, à 30 ans, Martine, qui s’est elle-même rebaptisée Betty, ne vieillit plus. Elle en prend conscience à l’âge même où sa propre mère a cessé de vieillir. Coïncidence ? Plutôt le manque d’une mère qui déterminera sa vie, comme la marque au fer rouge du traumatisme de la perte sur sa peau lisse. Elle est l’image vivante de cette mère, adorée, adulée, et disparue trop tôt, figée à jamais sur un polaroïd, et à présent sur le visage de sa fille.
« Peut-être devenons-nous ceux qui nous manquent. Peut-être remplissons-nous le vide, par angoisse du vide. Peut-être cristallisons-nous ce qu’ils ont été pour les garder auprès de nous toujours. »
Au début, Betty se réjouit de son sort. N’est-ce pas la rêve de toute femme ? Elle se regarde fièrement, jour après jour, dans le miroir pour constater que le temps n’est rien venu altérer. Mais petit à petit, les doutes surviennent. Elle ne parle même pas à son mari de sa découverte, jusqu’à ce qu’il finisse par craquer et mettre de lui-même le sujet sur le tapis. On pourrait s’attendre à ce qu’un homme soit ravi que sa femme reste jeune et belle. Après tout, toutes ces injonctions dont on inonde les femmes aujourd’hui, les publicités, les magazines, ne les conduisent-elles pas à penser malgré elles que les hommes ne les désireront plus avec l’apparition de leurs premières rides et des flétrissement de leur peau ? André, le mari de Betty, prend pourtant le contrepied. Ce qu’il veut lui, c’est cheminer aux côtés de sa femme, voir le temps passé ensemble sur son visage, y découvrir les traces de leurs souvenirs.
« Tu es comme un rivage duquel je m’éloigne et qui me rappelle sans cesse que je vais mourir. »
Ne pas vieillir devient pour Betty une malédiction. Au début, elle accueillait les compliments sur son joli teint, à présent elle les redoute. Le regard des autres est lourd à porter, elle s’interroge sur ses rapports avec son fils, qui bientôt aura l’air plus âgé qu’elle. En contrepoint de ses mésaventures, on trouve sa fidèle amie, Odette, qui a quelques années de plus qu’elle. Odette, représentante en cosmétiques, a testé tous les produits imaginables, et croit au pouvoir de la jeunesse et de la beauté pour retenir un homme. Elle tentera toutes les chirurgies possibles pour retarder l’inévitable, altérant définitivement son physique, et éloignant de ce fait son fiancé, aux yeux duquel elle est devenu méconnaissable, alors qu’elle pensait agir par amour.
« Je viens de la terre et je crois à la nécessité des saisons, on ne peut pas vivre qu’au printemps. »
Je n’ai pas eu le même coup de coeur que pour Danser au bord de l’abîme, qui m’avait bouleversée. Mais il y a une merveilleuse poésie chez Grégoire Delacourt, une efficacité des mots, et La femme qui ne vieillissait pas est un joli conte sur la nécessité du temps qui passe, et la beauté des visages dont les sillons racontent une vie.
Ma note (3 / 5)
- résumé de la quatrième de couverture