Pauline – Alexandre Dumas

Cela faisait longtemps que je souhaitais lire ce court roman, connu comme marquant l’incursion d’Alexandre Dumas dans la littérature gothique. On y retrouve en effet énormément de Wilkie Collins ou encore de Walter Scott dans l’atmosphère de ce roman, avec cette jeune femme naïve et persécutée, ces ruines d’abbayes désertes et lugubres, ces amours contrariées, et ces mystères qui ne demandent qu’à être élucidés.

« Vous vous réveillerez dans un caveau où nul n’est descendu depuis vingt ans, et dans lequel, d’ici à vingt ans peut-être, nul ne descendra encore. »

L’auteur recourt ici à la technique du récit enchâssé, puisqu’après avoir introduit son sujet en narrant les courts épisodes où il lui a été donné d’apercevoir une jeune femme mystérieuse nommée Pauline en compagnie de son ami Alfred de Nerval, le narrateur laisse la parole à ce dernier, qui à son tour laissera plus tard les rênes du récit à Pauline elle-même. L’histoire n’a rien d’extrêmement original, il y est question comme souvent dans la littérature gothique d’une jeune fille un peu trop romanesque pour son bien, trop peu au fait des choses de la vie, et surtout trop curieuse. Mal mariée à un homme qu’elle peine à comprendre, sa destinée va prendre un tour tragique. Alfred de Nerval, amoureux transi de la jeune femme, apprend par hasard sa mort, et se rend à son chevet pour lui rendre un dernier hommage. Comble des mystères, ce n’est pas Pauline qui se trouve étendue sous ses yeux, mais une inconnue. Déterminé à mener l’enquête et à retrouver Pauline, dans une Normandie vivant dans la crainte d’assassinats perpétrés par de mystérieux brigands, Alfred va peu à peu découvrir les terribles secrets entourant sa bien-aimée.

« Oh ! les jeunes filles, elles ne connaissent pas leur félicité ; elles ne savent pas que le malheur n’ose toucher au voile chaste qui les enveloppe et dont un mari vient les dépouiller. »

Je m’attendais à être totalement transportée par ce roman dont j’ai entendu tant vanter les mérites, mais il m’a fallu pourtant m’accrocher durant les premières pages, luttant contre l’ennui des descriptions du narrateur puis d’Alfred lui-même, personnage qui m’a semblé bien creux et insipide. Mon attention a en revanche été bien davantage ravivée par le récit de Pauline, qui multiplie les rebondissements. Dans l’ensemble, j’ai été moyennement convaincue par ce roman mélangeant le genre gothique et les récits de cape et d’épée auxquels Dumas nous a habitués. Sans doute n’a-t-il pas très bien vieilli, mais les passages pseudo-romantiques m’ont lassée, et certains épisodes sont bien trop descriptifs et lents pour que mon intérêt pour le roman ne s’émousse pas quelque peu.

« Le grand malheur de notre époque est la recherche du romanesque et le mépris du simple. Plus la société se dépoétise, plus les imaginations actives demandent cet extraordinaire, qui tous les jours disparaît du monde pour se réfugier au théâtre ou dans les romans ; de là, cet intérêt fascinateur qu’exercent sur tout ce qui les entoure les caractères exceptionnels. »

Cela étant, je suis comme toujours charmée par la prose impeccablement travaillée d’Alexandre Dumas, et ce roman, au-delà de son déguisement gothique, revêt par ailleurs d’autres aspects bien plus intéressants. On y retrouve la désillusion de l’auteur devant une société qu’il juge à la dérive, ainsi qu’une description glaçante du poids écrasant de la condition féminine, faisant dépendre entièrement les femmes d’un homme qui sera aléatoirement et selon son bon vouloir un protecteur ou un tortionnaire.

Ma note 3 out of 5 stars (3 / 5)

 

 

 

Éditions Livre de Poche, 27 janvier 2010, 256 pages

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