
Résumé :
Grady McNeil a dix-sept ans et l’âme passionnée. Alors que ses riches parents vont passer l’été en Europe, elle se retrouve seule dans un New York vibrant sous la canicule. Délaissant le luxe de la Cinquième Avenue, elle tombe amoureuse de Clyde, gardien de parking à Broadway. Ils s’aiment, mais de façon différente. La fierté provocante de Grady et la nonchalance de Clyde vont peu à peu les entraîner vers de dangereux précipices. Cette saison sera toute leur vie.
« La chaleur ouvre le crâne de la ville, exposant au jour une cervelle blanche et des noeuds de nerfs vibrant comme les fils des ampoules électriques. L’air se charge d’une odeur surnaturelle dont la puissance âcre imbibe les pavés, les recouvrant d’une sorte de toile d’araignée sous laquelle on imagine les battements d’un cœur. »
Mon avis :
D’une canicule à l’autre, quittons Paris pour un New-York brûlant !
D’un côté il y a Grady, jeune fille de dix-sept ans née dans une bonne et riche famille bourgeoise, qui refuse de suivre ses parents dans leurs vacances en Europe. Mi-enfant gâtée, mi-femme fatale, elle pose sur le monde qui l’entoure un regard bien mûr et désabusé. De l’autre il y a Clyde, qui travaille dans un parking de Broadway et dont la soeur vient de mourir. Deux vies et surtout deux milieux sociaux radicalement opposés, et pourtant ils vont tomber amoureux, presque crânement, comme un pied de nez aux conventions et aux attentes de leurs familles.
« Puisque l’on connait le passé et que l’on vit au présent, pourquoi ne pourrions nous pas croiser l’avenir en rêve ? »
Il y a beaucoup de finesse dans l’analyse des sentiments de ces deux personnages, livrés à eux-mêmes et impuissants face à la vacuité de leur existence. Le récit, qui commence comme une expérience d’amourette et de liberté adolescentes, prend petit à petit un tour plus grinçant, à mesure que Grady et Clyde s’enfoncent dans cet été de tous les dangers. Cette relation compliquée pourrait être extrêmement banale, mais tout est suggéré, ambigu, dotant le roman d’une atmosphère moite et menaçante.
« Peu à peu, avec l’amour, elle découvrit la haine pour cet homme qui la perçait à vif et ne venait pas à son secours. »
Je connais assez peu l’oeuvre de Truman Capote, et j’aurais par conséquent des difficultés à juger si ce roman est représentatif de son style. Ce qui est certain, c’est qu’on sent un goût d’inachevé. Pas forcément dans la fin du roman, qui est plutôt réussie dans son impact dramatique et percutant, mais davantage peut-être dans le traitement des personnages, il manque parfois un peu de profondeur dans certains ressorts du récit. La traversée de l’été est le premier roman de l’auteur, rédigé à l’âge de vingt ans, abandonné, repris des années plus tard, et abandonné de nouveau. Fallait-il alors faire fi du souhait de l’auteur et publier quand même ce roman, exhumé lors d’une vente aux enchères en 2004 ? Sacrée question éthique…
« Les fleurs contenaient l’été tout entier, avec ses ombres et ses lumières gravées dans les feuilles, et elle en pressa toute la fraîcheur contre sa joue. »
Mais on ne va pas bouder notre plaisir et je vous conseille ce petit bijou de littérature américaine, qui m’a souvent fait penser aux ambiances des romans d’un certain Fitzgerald, et dans lequel on sent déjà le talent foudroyant de Truman Capote.
Ma note (3,5 / 5)
Éditions Livre de Poche, traduit par Gabrielle Rolin, 27 février 2008, 160 pages
Je garde de ce roman une impression de douceur et de temps qui s’étire.
Je ne connaissais pas ce livre de Truman Capote :). Merci pour la découverte