Quand tu es parti – Maggie O’Farrell

Résumé :

Hospitalisée dans un coma profond, Alice se souvient : de l’amour fou avec John, un journaliste, fils d’un juif intégriste qui l’a renié ; de l’étrange enfant, puis de l’adolescente fragile et rebelle qu’elle a été ; de l’affection de sa grand-mère Elspeth et des heurts avec sa mère, Ann, beauté froide et énigmatique. Et tandis que toute la famille guette le moindre signe d’espoir, la genèse du drame affleure.

« Ils l’appelèrent Alice – un nom bref qui ne sembla jamais contenir en entier son tempérament. Le mot commence loin au fond de la gorge, pour s’achever sur une expulsion d’air par les lèvres. »

Mon avis :

Il est rare que je verse des larmes sur un livre, mais ce roman m’a brisé le coeur. De Maggie O’Farrell, j’avais lu il y a peu Assez de bleu dans le ciel, que j’avais beaucoup aimé, et les deux romans se rejoignent dans le style de narration, avec des époques et des points de vue qui s’alternent, ainsi que dans les thèmes abordés. Quand tu es parti est le premier roman de l’auteure, et je l’ai trouvé tout simplement bouleversant.

Au centre de tout il y a Alice. Les premières lignes nous apprennent qu’elle a pris le train pour Edimbourg, où elle rejoignait ses soeurs, et qu’elle a vu quelque chose de si choquant qu’elle a aussitôt pris la fuite et regagné Londres, pour se jeter sous les roues d’une voiture. Qu’a-t-elle bien pu apercevoir qui l’ait bouleversée à ce point ? On se rendra petit à petit compte que cette scène à la gare d’Edimbourg n’est qu’une blessure de plus dans la vie d’Alice, sans doute la blessure de trop. Après ça, plongée dans le coma, elle va et vient dans les méandres de sa mémoire, passant de son enfance à sa rencontre avec John, de son adolescence à ses années de fac, par association d’idées, en remontant le fil des souvenirs comme ils lui viennent, en reconstituant les pièces du puzzle de sa vie.

« Je suis quelque part. J’erre. Je me cache. Des pensées qui courent en rond sur des pistes, au hasard, déconnectées comme des billes dans le circuit d’un flipper. »

À ses souvenirs font écho ceux des deux autres femmes marquantes de sa famille. Sa mère Ann d’abord, une mère froide et sèche, coincée dans un mariage sans amour, et qui cache depuis de nombreuses années un lourd secret. Et sa grand-mère Elspeth, celle qui a apaisé ses tristesses d’enfant et son caractère volcanique, celle dont la rencontre avec son mari fait écho au coup de foudre de John et Alice des années plus tard. Leurs enfances, leur mariage, leurs aspirations, la difficulté d’être une femme aussi, quelque soit les époques. Petit à petit on comprend que la vie d’Alice est marquée par la vie des femmes qui l’ont précédées, par les décisions qu’elles ont prises, par la façon dont elle lui ont appris à vivre et à aimer.

Alice était une enfant étrange, si différente de ses soeurs, causant systématiquement de l’irritation à sa mère et souffrant de ne pas lui plaire. Puis une adolescente revêche, en rébellion perpétuelle et affolée par la soudaine proximité avec les garçons. Et enfin une jeune femme passionnée qui fait une rencontre qui va changer sa vie. Petit à petit est esquissée par petites touches son histoire d’amour avec John, dont on constate l’absence auprès d’elle dès le début du roman, sans en connaître la raison.

« Elle explore ce sentiment, prudemment, comme quelqu’un qui marche pour la première fois sur une jambe tout juste guérie, découvrant ses limites, guettant son moindre signe de faiblesse. »

C’est difficile de mettre le doigt exactement sur ce qui m’a touchée dans ce roman. Les sujets traités sont en effet si banals : la famille, le mariage, l’amour, les secrets, le deuil… Mais c’est précisément ce qui rend les destinées de ces personnages si compréhensibles et si proches, et qui fait ressentir tellement d’empathie pour eux. J’ai été totalement emportée dans cette plongée dans la vie d’Alice, dont les émotions sont retranscrites avec une telle précision que le coeur du lecteur semble battre à l’unisson du sien. C’est tout simplement renversant d’humanité.

Ma note 5 out of 5 stars (5 / 5)

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6 commentaires sur “Quand tu es parti – Maggie O’Farrell

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